Les schémas de cohérence territoriale poursuivent leur mutation

img_7064Les SCoT ont été créés par la loi solidarités et renouvellement urbain (SRU) en 2000. Les évolutions du contexte législatif, des périmètres administratifs et des dynamiques territoriales, sont autant de facteurs qui ont entrainé des évolutions des SCOT, qui entrent aujourd’hui dans leur 2ème ou 3ème génération.

En complément du « panorama des SCoT de Loire-Atlantique » publié par l’AURAN en 2017, ce dossier du mois vise à présenter et contextualiser les évolutions que devront anticiper et prendre en compte les futurs SCoT, dans un contexte de renouvellement électoral et d’évolutions législatives qui restent encore en attente à ce jour.

Si la loi ELAN et ses ordonnances à venir vont impacter le contenu du SCoT, l’évolution des compétences de la Région en matière d’aménagement du territoire via le SRADDET et la récente instruction gouvernementale en faveur d’une gestion économe de l’espace, vont également jouer un rôle sur le contenu, et la manière de construire ces futurs documents.

Ce dossier expose succintement les évolutions de la loi ELAN ayant un impact sur le contenu du SCoT (en matière d’aménagement commercial et d’application des dispositions de la loi littoral principalement) ainsi que les enjeux d’articulation avec les stratégies régionales issues du SRADDET.

Dans une période d’évaluation et de révision de SCoT, l’AURAN accompagnera ses adhérents dans la prise en compte de ces évolutions.

 

Les SCoT de Loire-Atlantique en quelques chiffres

Une évolution des SCoT liée au contexte réglementaire

La loi ELAN (Evolution du Logement, de l’Aménagement et du Numérique) promulguée le 23 novembre 2018 comporte un certain nombre de dispositions en matière d’urbanisme.

Si le sort du SCoT (en particulier son échelle et son contenu) est reporté à plus tard, en permettant au gouvernement d’intervenir par voie d’ordonnance, d’autres points de cette loi vont déjà faire évoluer ce document stratégique.

En effet, alors que la loi Pinel l’avait rendu facultatif, le document d’aménagement artisanal et commercial (DAAC) redevient obligatoire au sein du SCoT. Le document d’orientation et d’objectif (DOO) devra également prévoir le type d’activité et la surface de vente maximale des équipements commerciaux spécifiques aux différents secteurs d’activités.

Par ailleurs, les évolutions de l’article L121-8 du code de l’urbanisme, concernant l’urbanisation dans les communes littorales, entrainent également des évolutions du contenu du SCoT.

Des ordonnances encore en attente

3 ordonnances devraient paraitre prochainement pour instaurer de nouvelles mesures de simplification de la planification :

  • une ordonnance sur les Schémas d’Aménagement Régional (SAR ; document de planification qui, en Outre-Mer fixe des orientations fondamentales de la Région dans de nombreux domaines).
  • une ordonnance sur les SCoT
  • une ordonnance sur la hiérarchie des normes.

S’engageant dans une forme participative, le ministère de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités a lancé début avril 2019 une plateforme en ligne « planifions nos territoires ensemble ».

 

Pendant plusieurs mois, les participants ont ainsi pu témoigner et proposer leurs idées en matière de planification territoriale sur un espace collaboratif organisé en 4 grandes thématiques :

  • la rationalisation de la hiérarchie des normes
  • la modernisation du Schéma de Cohérence Territoriale
  • la simplification du Schéma d’Aménagement Régional
  • la planification de demain pour alimenter les futurs chantiers du ministère

Parallèlement, des ateliers thématiques ont été organisés pour mieux intégrer les politiques sectorielles dans les documents d’urbanisme (la mer, l’agriculture, les risques, l’énergie…).

Les contributions sont disponibles en ligne, et permettent de nous éclairer sur les éléments saillants qui ressortent de cette consultation. Ainsi, de nombreux commentaires s’accordent à demander en premier lieu une stabilité du code de l’urbanisme, permettant ainsi aux documents d’urbanisme de faire leur preuve, sans être continuellement en évolution pour tenir compte des modifications législatives. Il en est de même sur le contenu du SCoT, qui semble avant tout nécessiter de la stabilité. Elus et techniciens s’accordant à dire que maintenant qu’ils maîtrisent le contenu du SCoT, ils peuvent s’attacher à le rendre plus efficient et plus adapté aux spécificités territoriales.

A cet égard, plusieurs contributaires, demandent à ce que, sans changer le fond des thématiques pouvant être traitées, celles-ci soient davantage « à la carte » et permettent au territoire de mobiliser et de traduire dans le PADD et le DOO celles qui permettent de mettre en œuvre le projet qui répond aux enjeux du territoire. Un « socle minimum » est toutefois évoqué, en écho aux grands enjeux d’aujourd’hui comme la prise en compte des dynamiques territoriales, les mobilités, le lien entre les espaces ruraux et les espaces urbains, l’armature territoriale, les transitions écologiques, énergétiques, démographiques, économiques et le changement climatique…

Par ailleurs, la frontière du « qui fait quoi » entre le SCoT et le PLUI, et le niveau de prescription du DOO des SCoT, alors opposables dans un niveau de compatibilité vis-à-vis des PLU semblent davantage poser question et plusieurs contributeurs s’acordent à demander une clarification de ce point.

Un Document d’Aménagement Artisanal et Commercial (DAAC) obligatoire

Si la quasi-totalité des dispositions relatives au volet commercial des SCOT existait depuis la loi Pinel, la loi ELAN rend désormais obligatoire la réalisation d’un volet commercial et demande aux auteurs du SCoT de fixer des surfaces de vente mximales des équipements commerciaux spécifiques.

Ce DAAC est un outil « multi-usage » dont les contours législatifs laissent une assez grande marge de manœuvre aux collectivités. Ainsi, dans la mesure où sa responsabilité juridique est indépendante des autres pièces du SCoT, son contenu pourra s’adapter aux enjeux du territoire et besoins d’encadrement exprimés.

A ce jour, plusieurs SCoT de Loire atlantique ne comprennent pas de volet commercial de ce type, même si des dispositions en matière d’aménagement commercial sont précisées dans le DOO des SCoT. Ce nouveau DAAC, permettra surtout aux futures générations de SCoT de moduler leurs dispositions en matière d’aménagement commercial au regard des besoins de régulation du territoire.
Dans les communes littorales, le principe d’urbanisation en continuité revisité

L’article 42 de la loi ELAN, modifie les articles relatifs aux dispositions de la loi littoral. Les modifications portent principalement sur la suppression des hameaux nouveaux intégrés à l’environnement, et la clarification des possibilités de densification dans les secteurs déjà urbanisés, en dehors de la bande des 100 mètres et hors espaces proches du rivage, dans des conditions définies1.

L’article L 121-3 est également complété pour que les SCoT déterminent les critères d’identification des villages, agglomérations et autres secteurs déjà urbanisés (…) et en définissent la localisation. Les futurs SCoT du département concernés (Pays de Retz, pôle métropolitain Nantes Saint-Nazaire, Cap Atlantique), devront revoir leur partie application de la loi littoral en ce sens.

Afin de mettre en oeuvre ces dispositions nouvelles, le texte prévoit toutefois la possibilité de recourir à des procédures de modification simplifiée pour les SCoT et les PLU ou PLUI, avant le 31 décembre 2021. Dans l’attente, ces dispositions pourront être appliquées même en l’absence de modification du SCoT.

Des SCoT, qui devront se construire en renforçant le dialogue avec la Région

L’ordonnance n° 2016-1028 du 27 juillet 2016 et le décret n° 2016-1071 du 3 août 2016 sont venus préciser le cadre de l’élaboration du SRADDET et son contenu. Ces textes ont notamment précisé le rôle intégrateur et transversal de ce nouveau schéma.

Celui-ci prend ainsi racine dans la fusion de schémas régionaux thématiques existants auquel il se substituera à son approbation : le Schéma Régional de Cohérence Ecologique (SRCE), le Schéma Régional Climat-Air-Energie (SRCAE), le Schéma Régional d’Infrastructures et de Transports (SRIT), le Schéma Régional d’Infrastructures (SRI) et le Plan Régional de Prévention et de Gestion des Déchets (PRPGD). Il a vocation à les synthétiser, les croiser et les enrichir pour donner une vision stratégique, intégrée et plus cohérente sur l’aménagement du territoire régional et permettre une meilleure lisibilité des enjeux d’aménagement, de préservation et de valorisation environnementales.

 

3 documents devront composer le SRADDET : un rapport d’objectifs, un fascicule de règles et des annexes.

 

Les Schémas de Cohérence Territoriale (ou à défaut les PLU ou cartes communales), les Plans de Déplacements Urbains, les Plans Climat-Air-Energie Territoriaux et les chartes de Parcs Naturels Régionaux devront alors renforcer leur dialogue avec la région dans le cadre de leur élaboration ou révision. Dans le cadre de l’élaboration de ces documents infrarégionaux, la Région pourrait renforcer sont rôle en tant que personne publique associée, pour veiller à la prise en compte des orientations du SRADDET.

Le projet de SRADDET des Pays de la Loire sera arrêté par le Conseil Régional en mars 2020, pour une approbation prévue en décembre 2020.

Vers une 3ème génération de SCoT en Loire-Atlantique

De nombreux SCoT du département arrivent au terme de 6 ans d’application, et doivent être évalués. Cette évaluation est l’occasion définir l’opportunité (ou non) de procéder à une révision du SCoT. C’est le cas par exemple du Pays de Retz qui a délibéré sur l’évaluation de son SCoT le 25 juin 2019. Si le choix a été fait de maintenir le SCoT en vigueur, les conclusions de la délibération s’appuient surtout sur l‘incertitude qui porte sur le contenu du futur document dans un contexte où le SRADDET est en cours de réalisation et dans l’attente des ordonnances issues de la loi ELAN à venir. Ces justifications laissent toutefois penser qu’une révision pourrait s’avérer nécessaire d’ici quelques mois.

Par ailleurs, la COMPA mène également une évaluation de son SCoT qui devra aboutir sur une décision de révision ou non avant le 28 février 2020. Le Pays du Vignoble réfléchit également à une révision en engageant l’évaluation de son SCoT bien avant le délai fixé par la loi.

Au-delà des évolutions règlementaires des derniers mois et des ordonnances à venir, d’autres facteurs laissent suggérer des révolutions plus profondes en matière d’aménagement du territoire qui devront être menées dans les futures générations de SCoT.

L’instruction gouvernementale du 29 juillet dernier visait d’ailleurs à affirmer l’engagement de l’Etat en faveur d’une gestion économe de l’espace. Cette instruction s’ouvrait sans équivoque sur « Le Président de la République a annoncé la mise en place du principe de zéro artificialisation nette du territoire à court terme », rappellant aux services décentralisés de l’Etat, leur devoir d’agir afin de rendre applicable cet objectif, en renforcant leur accompagnement de proximité.

Ce principe soulève aujourd’hui de nombreuses questions tant sur sa définition que son échelle de compensation. Elle soulève surtout la question de son adaptation dans un territoire tel que la Loire-Atlantique, dont la croissance démographique est plus de deux fois supérieure à la moyenne nationale.

Il y a fort à parier que l’enjeu des prochains SCoT résidera dans leur capacité à infléchir les tendances d’artificialisation des sols, sans dégrager l’accueil d’une population toujours plus nombreuse et diversifiée.

 

1: Les conditions définies consistent à autoriser l’urbanisation à des fins exclusives d’amélioration de l’offre de logement ou d’hébergement et d’implantation de services publics, lorsque ces constructions et installations n’ont pas pour effet d’étendre le périmètre bâti existant ni de modifier de manière significative les caractéristiques de ce bâti.